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Dans cette optique générale, les sujets de recherche du projet M3N se sont orientés autour des quatre axes décrits ci-dessous.
Un autre problème particulièrement important dans ce cadre est
l'étude des écoulements sur des parois rugueuses. A titre
d'exemple, les coques des bateaux, les pales de turbines ou
encore le bouclier thermique d'une tuyère qui subit une ablation
sous l'effet de la chaleur ne sont pas parfaitement lisses et
présentent des rugosités qui modifient les performances
aérodynamiques du corps étudié. En météorologie-océanographie, le
problème de trouver une condition aux limites à l'interface
océan-atmosphère passe par la prise en charge de l'influence des
vagues sur l'écoulement atmosphérique. Dans les deux cas on
retrouve la même difficulté de traiter les différentes échelles
de grandeurs contenues dans le domaine. En effet, la nécessité
d'une description précise des rugosités associée au fait que la
vitesse dans la couche limite passe de zéro à sur une distance
,
oblige à utiliser des maillages extrêmement fins. En raison de ce
coût élevé pour résoudre les équations de Navier-Stokes sur de
tels domaines, les ingénieurs et météorologues traitent
généralement seulement les grandes échelles en négligeant l'état
rugueux du domaine. Ces approximations s'avèrent souvent
insuffisantes pour retrouver les bons profils expérimentaux. Il
est donc indispensable de mettre au point de nouvelles approches
pour traiter les petites échelles à un faible coût. Les lois de
parois apparaissent alors comme une alternative pour retirer du
domaine de calcul la région de fort gradient contenant les
rugosités. Les lois de parois sont des conditions aux limites
équivalentes imposées à l'intérieur du domaine, ayant l'objectif
de simuler l'influence de la paroi sur l'écoulement. Les
premières lois de parois ont été établies de façon empirique,
dans le cadre des écoulement turbulents sur parois lisses et
validées par des nombreux essais expérimentaux. Ces lois de
parois sont souvent dites logarithmiques parce que elles sont
établies dans une région de la couche limite où la vitesse suit
un profil logarithmique. Les lois logaritmiques restent valables
sur les parois rugueuses, mais certaines constantes doivent être
modifiées en fonction de la géométrie de l'obstacle. Cependant,
jusqu'à présent, aucune stratégie générale n'a été mise au point
pour simuler de façon automatique l'influence des différentes
géométries de rugosités sur l'écoulement global. De plus, ces
lois de parois manquent d'une base mathématique solide permettant
d'établir une analyse d'erreur, et de construire de nouvelles
lois plus générales qui s'adapteraient automatiquement à la forme
de la rugosité. Le projet M3N cherche donc à développer de
nouveaux cadres mathématiques et numériques pour construire et
analyser des nouvelles lois de parois prenant mieux en compte les
effets thermiques locaux ou les rugosités géométriques. Un
premier cadre s'appuie sur une résolution quasi-analyique des
équations dans la couche limite, avec utilisation locale d'un
modèle logarithmique de viscosité turbulente. Cette résolution
locale est couplée à l'extérieur par des conditions aux limites
de couplage issues des méthodes de décomposition de domaine. Une
autre approche utilise une méthode de développement asymptotique
à deux échelles.
Le dernier aspect de la recherche est d'essayer d'optimiser ou de contrôler de manière quasi-automatique les formes aérodynamiques des objets étudiés. L'idée est de mettre au point une chaine d'optimisation en étudiant chacun de ses aspects :
Cette approche est assez générale. Son efficacité locale dépend avant tout: de la pertinence de la paramétrisation de formes et de la fonction coût choisies, de l'efficacité de la discrétisation (du maillage) et des solveurs utilisés pour résoudre les équations d'état discrètes, de la forme de départ utilisée.
Son coût est directement lié au coût de résolution des équations directes et à l'encombrement mémoire nécessaire pour stocker les résultats intermédiaires dans les procédures de calcul automatique de gradient en mode adjoint. Ces coûts sont encore prohibitifs si les équations d'état incluent les équations de la Mécanique des Fluides Visqueux écrites sur des domaines tridimensionnels et un effort est donc nécessaire dans ce sens.
Les travaux récents des différentes équipes de recherche, et en particulier du projet M3N, ont permis de dégager et d'analyser une méthodologie générale pour la résolution numérique des problèmes d'interactions entre un fluide visqueux en écoulement et une structure souple en grands déplacements [Mou96]. Cette méthodologie propose de
Le premier problème à surmonter dans cette approche est de savoir discrétiser proprement les différentes composantes du système étudié. Ce problème déborde en fait largement du cadre fluide-structure.
Dans la simulation numérique de tous les problèmes de mécanique liés à l'industrie (pneumatiques, plate-formes pétrolières, etc.), il est indispensable de savoir contrôler l'erreur induite par les approximations. Dans ce cadre, on utilise les estimateurs d'erreur a posteriori, soit pour contrôler l'erreur, soit pour adapter le maillage utilisé afin de diminuer le coût de calcul. Notre contribution ici consiste à définir, analyser, implémenter et valider numériquement des estimateurs d'erreurs a posteriori du type résidu pour des problèmes elliptiques non homogènes (voir [61]) . En particulier, nous sommes particulièrement intéressés, en liaison avec le projet MOSTRA, par les problèmes d'élasticité en grandes déformations avec coefficients élastiques fortement hétérogènes.
Le second problème est ensuite d'adapter et d'appliquer ces techniques à la solution de problèmes industriels ou médicaux complexes, comme les calculs d'écoulements autour des grands ponts, ou l'analyse des anévrismes. L'anévrisme cérébral chez l'homme est une dilatation sacciforme localisée de la paroi artérielle. Du fait de ces complications (thromboses, compression, rupture), cette lésion peut avoir des conséquences individuelles dramatiques. Ces anévrismes sacciformes sont implantés dans un embranchement artériel où se produit une forte interaction entre l'écoulement sanguin et les déformations des parois. Le problème est alors de prédire et d'analyser les contraintes hémodynamiques afin d'étudier la genèse et l'évolution pré et postopératoire des cavités anévrismales. Mais pour ce faire, il faut déjà connaitre la configuration du col de l'anévrisme de de la zone de division vasculaire au voisinage du col. Cette configuration étant inconnue, la stratégie va donc consister à effectuer dans un premier temps un angiographie RMN associée à une vélocimétrie, chez des malades volontaires à distance de toute complication. L'angiographie va permettre de définir le contour de la malformation, la vélocimétrie de fournir une information qualitative sur le champ de vitesses sanguin, utile pour valider le modèle et définir les conditions aux limites. Une fois la paroi de l'anévrisme acquise, il s'agira de la mailler par éléments finis, puis de discrétiser le problème fluide interne, et enfin de calculer par éléments finis les grandeurs mécaniques et les contraintes à la paroi, en utilisant les stratégies de couplage fluide-structure préalablement développées.
Le modèle de base est un modèle de dérive diffusion. Ce modèle est associé à des équations aux dérivées partielles elliptiques hétérogènes, nonsymétriques et fortement nonlinéaires. Les hétérogénéités sont particulièrement violentes puisque les densités électroniques peuvent varier d'un facteur de plusieurs milliards. La résolution numérique de ces équations de dérive diffusion nécessite donc des méthodes d'approximation spécifiques, des maillages adaptés et des solveurs algébriques robustes. L'axe de travail du projet M3N dans ce cadre utilise des éléments finis mixtes [BF91] de bas degré, permettant de conserver exactement les courants au niveau discret, des maillages nonstructurés adaptatifs, et une stratégie de résolution nonlinéaire utilisant transitoire artificiel, relaxation des équations et méthode de Newton [GL89]. Cette stratégie nécessite de résoudre une sucession de problèmes algébriques linéaires nonsymétriques, très mal conditionnés et de grande taille, pour lesquels il faut adapter les algorithmes de calcul matriciel existants.
De par la miniaturisation des dispositifs simulés, il devient aussi maintenant nécessaire d'étudier des modèles plus riches que le modèle de dérive-diffusion classique. En particulier, pour prendre en compte les phénomènes thermiques, il est nécessaire de faire entrer en jeu l'énergie des porteurs. Les deux principaux modèles fluides incorporant une équation de conservation de l'énergie sont le modèle hydrodynamique et le modèle de transport d'énergie. Ils dérivent tous deux de l'équation de transport de Boltzmann, mais ces liens doivent être éclaircis pour bien comprendre les principes et limites de validité de ces nouveaux modèles.
Dans tous les cas, la simulation numérique de ces modèles cinétiques, souvent à base de combinaison de méthodes particulaires et de techniques de Monte Carlo est délicate et exige de gros moyens de calcul. Elle doit donc être couplée à des approches plus classiques de mécanique des fluides.
Trois tâches se dégagent dans ce contexte. La première tâche proposée est d'abord d'améliorer la pertinence physique des modèles utilisés. Le travail réalisé en collaboration avec l'Institut de Mécanique Théorique et Appliquée de Novosbirsk a pour but de bien modéliser les mécanismes élémentaires de collision intermoléculaires, en prenant en compte les variations d'énergie interne induites, et plus particulièrement en étudiant l'évolution des énergies de vibration.
La seconde tâche est de comprendre les mécanismes de
transition qui permettent de passer d'une modélisation cinétique
fine à un modèle hydrodynamique. Les régimes visés par cette
étude sont des écoulements hypersoniques à nombre de Mach élevé
(20), à faible nombre de Reynolds (Re/m
100000) et à basse température. L'idée de base poursuivie
récemment consiste à utiliser l'approximation exponentielle
proposée par D. Levermore pour approcher de manière positive et
cohérente la densité cinétique des particules à vitesse et
position données à l'intérieur de la couche limite.
La dernière tâche consiste à utiliser les deux niveaux de modèle de manière adaptative et couplée. La technique de base pour coupler les équations de Boltzmann ou d'une de ses approximations asymptotiques avec les équations de Navier-Stokes utilise un couplage interfacique par demi-flux, fondée sur une interprétation cinétique des flux [22]. Les problèmes à résoudre concernent alors l'écriture des modèles asymptotiques, la détermination automatique des domaines, l'écriture des conditions d'interface, la mise au point d'un algorithme de couplage efficace et conservatif.
Les techniques particulaires sont aussi très utiles à la compréhension des écoulements à bulles. Il s'agit de développer des modèles permettant de décrire le mouvement de bulles gazeuses ou de particules solides dans un fluide en mouvement. La difficulté est de décrire correctement les interactions entre bulles ou particules, et l'interaction entre chaque bulle et le fluide environnant.
Le dernier problème de modélisation de fluides complexes est
lié aux problèmes d'eutrophisation et de frontières libres pour
un écoulement rotationnel torrentiel ou fluvial; trois approches,
s'appuyant sur une formulation et
déjà validées en deux dimensions d'espace, sont à l'étude. La
première utilise un opérateur elliptique
pour la fonction de courant
et une méthode des caractéristiques
pour le transport du tourbillon
. Elle semble
bien s'appliquer aux études de bassins versants et d'écoulements
torrentiels, aux problèmes incluant des phénomènes
d'eutrophisation mono- et di-phasique. La seconde repose sur
solveur biharmonique adoptant une discrétisation mixte
de classe
optimale. La dernière utilise une technique de suivi de front
d'ondes.