Projet Calligramme

previous up next contents
Précédent : Composition de l'équipe Remonter : Projet CALLIGRAMME, Logique Linéaire, Réseaux Suivant : Fondements scientifiques



Présentation générale et objectifs

La création officielle du projet CALLIGRAMME s'est effectuée en mai 1996. Le thème de recherche de base du projet est la logique linéaire : sa syntaxe, sa sémantique, ses rapports avec les formalismes constructifs traditionnels, mais plus spécifiquement l'étude des réseaux de démonstration et de leurs proches parents, les réseaux d'interaction. Les applications de ces recherches sont orientées vers le calcul parallèle (calculs de processus et langages de programmation spécialisés), et surtout vers la linguistique : une grande part de nos recherches porte sur le développement du formalisme des grammaires catégorielles et l'étude de leurs relations avec la sémantique, ceci dans le but de construire des analyseurs syntaxiques et sémantiques plus performants et plus faciles à intégrer à des systèmes complexes.

La logique linéaire

La logique linéaire[Gir87] est une nouvelle logique constructive, issue d'une réflexion de J.-Y. Girard quant au besoin d'améliorer la représentation des démonstrations. Elle peut se comprendre comme résultant d'une analyse fine du rôle joué par les règles structurelles dans le calcul des séquents de Gentzen[Gen55]. Ces règles, considérées traditionnellement comme secondaires, spécifient que les séquences de formules apparaissant dans les séquents peuvent être traitées comme des (multi)ensembles. Elles sont au nombre de trois dans le cas de la logique intuitionniste (et, par symétrie, au nombre de six dans le cas de la logique classique[*]) :

\begin{displaymath}\frac{\Gamma \, \mathrel{\vrule height 1ex width 0.3ex dept... ...rel{\mkern-3mu}\mathrel{\smash-}}\, C}\;\;\mbox{(Contraction)}\end{displaymath}

\begin{displaymath}\frac{\Gamma, A, B, \Delta \, \mathrel{\vrule height 1ex wi... ...mathrel{\mkern-3mu}\mathrel{\smash-}}\, C}\;\;\mbox{(Echange)}\end{displaymath}



Ces règles, loin d'être innocentes, sont pourvues d'un contenu logique important : la règle d'affaiblissement précise que certaines hypothèses peuvent ne pas être employées au cours d'une dérivation ; semblablement, la règle de contraction spécifie que toute hypothèse peut être employée un nombre illimité de fois ; quant à la règle d'échange elle stipule qu'il n'existe aucun ordre entre les hypothèses. Pour ces raisons, l'adoption des règles structurelles au sein d'un calcul des séquents conditionne fortement les propriétés du système logique spécifié. Par exemple, dans les formulations dues à Gentzen de la logique classique ou intuitionniste, la seule règle de contraction a pour conséquence la non-décidabilité du calcul des prédicats. Quant à l'emploi des règles d'affaiblissement et de contraction à droite dans le cas de la logique classique, il est responsable des aspects non constructifs de cette dernière.

Dans le cadre de cette analyse, la logique linéaire peut être comprise comme un système conciliant le constructivisme de la logique intuitionniste et la symétrie de la logique classique. Tout comme en logique intuitionniste, le caractère constructif est obtenu en rejetant l'usage des règles d'affaiblissement et de contraction dans la partie droite du séquent. Mais ce faisant, afin de conserver un système symétrique, on rejette également l'usage de ces mêmes règles dans la partie gauche.

Le système résultant, appelé logique linéaire rudimentaire (voir Table 1),



\begin{table}\begin{center}\begin{tabular}{\vert\vert l\vert c\vert c\vert c\... ...Table 1 : {\it Les connecteurs de la logique lin\'eaire}\end{center}\end{table}


présente de nombreuses propriétés intéressantes. Il est pourvu de quatre connecteurs (deux conjonctions et deux disjonctions) et de quatre constantes correspondant aux éléments neutres de ces premiers. Il est complètement symétrique, bien que constructif, et est pourvu d'une négation involutive. De ce fait, il obéit à des lois similaires à celles de De Morgan. L'implication linéaire, par exemple, n'est pas une primitive. Elle peut se définir, comme en logique classique, de la manière suivante : $A \mathbin{{-}\!{\circ}} B \, = \, A{}^{\bot}{} \Par B$.

En logique linéaire rudimentaire, toute hypothèse doit être utilisée une et une seule fois au cours d'une dérivation. Cette propriété, qui permet de considérer la logique linéaire comme un calcul de ressources, est due, comme nous l'avons vu, au rejet des règles structurelles. Cependant, l'absence totale de celles-ci implique également que la logique linéaire rudimentaire est un système beaucoup plus faible que la logique intuitionniste ou classique. Aussi, afin de restaurer la puissance de ces dernières, est-il nécessaire d'ajouter au système des opérateurs permettant de récupérer le contenu logique des règles d'affaiblissement et de contraction. Ceci est réalisé, dans le cas de la logique linéaire complète, par le biais de deux modalités permettant un usage limité des règles structurelles, respectivement à gauche et à droite du séquent. La logique linéaire ne nie donc pas l'utilité des règles structurelles mais en souligne, au contraire, l'importance logique. De ce fait, elle les rejette en tant que règles épithéoriques[Cur77] afin de pouvoir les incorporer dans son système comme règles logiques contrôlées par l'utilisation de nouveaux connecteurs. C'est cette idée originale qui confère à la logique linéaire toute sa finesse et sa puissance.



Notes:

...classique
Dans le cas de la logique intuitionniste, un séquent est composé d'une suite d'hypothèses et d'une conclusion unique. En logique classique, les séquents sont symétriques. Ils sont donc formés d'une suite d'hypothèses et d'une suite de conclusions, l'interprétation de ces dernières étant disjonctive.



previous up next contents Précédent : Composition de l'équipe Remonter : Projet CALLIGRAMME, Logique Linéaire, Réseaux Suivant : Fondements scientifiques